QNB: Baisse d’inflation entraîne réductions de taux d’intérêt dans zone euro

Comment le Covid-19 et la guerre russo-ukrainienne ont catapulté l’inflation dans la zone euro

La pandémie de Covid qui a débuté en 2020 a engendré une cascade d’événements sans précédent, provoquant une inflation record dans la zone euro en 2022. Durant les premiers moments de la pandémie, des entraves et des embouteillages dans la chaîne logistique ont créé des limitations dans l’offre des produits. Les politiques en place ont répondu en imposant des mesures de relance économique et budgétaire ambitieuse visant à augmenter la demande. De surcroît, la guerre en Ukraine en 2022 a causé un choc considérable sur les matières premières, avec des conséquences surtout douloureuses pour l’Europe. En effet, celle-ci dépendait largement des importations d’énergie provenant de Russie. Ces éléments ont conduit à une inflation record de 10,6 % en glissement annuel en octobre 2022 au sein de la zone euro.

Evolution de l’inflation dans la zone euro

Cela a provoqué une réaction de la Banque Centrale Européenne (BCE) puisque l’inflation dépassait l’objectif fixé par la politique monétaire. La BCE a répliqué par une série inédite de 10 augmentations des taux d’intérêt consécutives, montant son principal taux de refinancement de 450 points de base pour le porter à 4,5 % en septembre 2023. Cette action visait à contrôler l’inflation. A la suite d’un pic atteint en octobre 2022, l’inflation a commencé à s’inflater, notamment grâce à la baisse des prix de l’énergie et de l’assouplissement des conditions de la chaîne d’approvisionnement. L’inflation a été enregistrée à 2,9 % lors de la dernière annonce, soit une baisse de près de huit points de pourcentage en un an. L’inflation est donc maintenant très proche de l’objectif de 2 % fixé par la BCE.

Selon notre analyse, étant donné la baisse significative et stable de l’inflation, il est fort probable que la BCE commence à assouplir ses taux d’intérêt dans les mois à venir. Cet article se propose d’évaluer les deux facteurs clés qui soutiennent cette hypothèse.

D’une part, la chute des prix de l’énergie, incluant le pétrole à l’international et le gaz naturel sur le marché européen, contribue à la baisse de l’inflation. Le pétrole et le gaz naturel ont un impact non seulement direct sur les prix de consommation mais aussi indirect en entrainant une baisse des coûts de production pour les entreprises. Par exemple, le prix moyen du pétrole Brent a atteint 124 dollars par baril en juin 2022 et est depuis retombé dans une fourchette de 75-80 dollars par baril. De manière plus frappante encore, le prix du gaz naturel européen est passé d’une moyenne de 147,1 euros par MWh en deuxième semestre 2022 à 38 euros en décembre 2023. Cela a entrainé une baisse de presque 2 points de pourcentage de l’inflation en novembre.

Prix du gaz naturel en Europe

D’autre part, la baisse des coûts de l’énergie se répercute indirectement sur les prix à la consommation par le biais de la diminution des coûts de production, dont l’effet est encore plus notable et mettra du temps à se manifester pleinement. Considérant l’indice des prix à la production (IPP), qui mesure les prix payés aux producteurs de biens et de services, les prix ont baissé en moyenne de 10 % en glissement annuel durant les trois derniers mois. Avec une crise énergétique semblable à celle de 2022 peu probable, la baisse des coûts de production continuera à renforcer la tendance baissière de l’inflation globale.

Par ailleurs, l’assouplissement du marché du travail dans une économie stagnante diminuera également les pressions sur les coûts salariaux pour les entreprises, et par conséquent, l’inflation. Les taux de chômage dans la zone euro se sont stabilisés à 6,5 %, qui est le taux le plus bas depuis 2000. Cependant, après un fort rebond post-pandémique, l’économie est restée stagnante tout au long de 2023 avec une contraction du PIB de 0.1 % au T3-2023 et une contraction similaire prévue pour le T4-2023. Ces contractions plongeraient l’économie en récession, définie comme deux trimestres consécutifs de croissance négative.

Les taux d’intérêt actuels de la BCE sont élevés comparés au taux d’intérêt réel neutre, ce qui insinue qu’ils sont restrictifs pour l’économie. Le taux d’intérêt réel neutre est défini comme étant le taux d’intérêt nominal déduit de l’inflation qui s’oppose à une économie en équilibre. Pour la zone euro, les estimations placent le taux réel neutre proche de 0 %. Par contre, le taux directeur nominal actuel de 4,5 % moins l’inflation de 2,9 % suggère un taux d’intérêt réel d’environ 1,6 %. De ce fait, le taux d’intérêt réel de 1,6 % est nettement plus élevé que le taux d’intérêt réel neutre. Cela signifie que le taux directeur est élevé, qu’il est fortement restrictif et qu’il exerce une pression trop forte à la baisse sur l’économie.

En résumé, l’inflation a fortement baissé depuis son pic dans la zone euro et tend vers l’objectif de 2 % grâce à la stabilisation des prix de l’énergie et à la stagnation de l’économie. Selon notre analyse, ces développements laissent entrevoir une possible baisse des taux d’intérêt dans les mois à venir.

Communiqué de presse

Laisser un commentaire